Le hasard (et l'attention des amis) font bien les choses. Il est 15h04. Un fond de riz grossit dans mon autocuiseur ; de toute la journée, je n'ai encore absorbé qu'une seule tasse de café. Mais quel café ! Venu tout droit des plantations de Java, la belle Java, aux réminiscences du gamelan haut perché des palais vides de Jogjakarta, il a patiemment bouilli dans le coffre de la Senorita, cafetière italienne - ou bien est-elle colombienne ? - aux courbes insolites et brillantes, dénichée dans une vente de trottoir aux alentours de Jean Talon. Il a embaumé le salon double d'un parfum chaud et lourd, il est descendu lappée après lappée le long de mon oesophage resserré de trop de repas bâclés, et s'épanouit désormais, de minute en minute, sous la forme de tressautements continus de toutes mes terminaisons nerveuses.
Je suis heureux. Pourrais-je survivre sans le café ? Y a-t-il plus doux parfum - corsé, pesant, chaleureux - que les lèvres d'une jeune fille après qu'elle les ai trempées dans son bol ? Je me souviens d'un entretien d'embauche à la fin duquel, à la question "Avez-vous quelque chose à ajouter ?", je suis parti d'une tirade de près de dix minutes sur la façon dont l'acquisition d'une machine à espresso avait bouleversé les méthodes de travail à l'Ambassade de France en Chine. Ce fut une rencontre plaisante mais pour le moins étrange, dans des locaux à la viabilité suspicieuse ; huit jours plus tard, alors que je devais entrer en poste, l'ensemble du conseil d'administration et du staff allait démissionner, rendant de fait inexistante la structure.
J'ai donc souri de toutes mes dents en recevant ce petit lien à matin, en attendant mon riz.
(merci Pascaline pour cette merveille !)
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