Alors voilà : mon tour a fini par arriver.
Voilà cinq ans de cela, à une époque adolescente où je croyais encore être un auteur en devenir, et tandis que je quittais mes terres européennes pour un voyage qui devait être court (je n'y ai guère depuis passé que quatre mois en cumulé), mes proches me suggéraient d'ouvrir mon propre blog, afin de les tenir informés et de publier quelques-uns de mes carnets de route.
Naïvement, je m'y refusais. De vagues convictions éthiques, mal formulées, mal assurées – une sorte de réactionnisme anti-sphère, un acte isolé qui rêvait vainement de sauver la littérature. Il me semblait inconcevable de devoir publier quelque pensée que ce soit sur le Net. Fascisme de vieillard ? J'ai toujours été hautement conservateur en art. Ne serait-ce la danse, l'humanité n'a à mon sens plus rien créé de bon depuis la Grande Dépression. Ma prose elle-même en appelait à Cendrars, à Steinbeck. Je me trompais sur tout la ligne. Car ils étaient chantres du futurisme, poètes de l'industrialisation effrénée : ils voyaient juste en l'avenir, avaient en fin de compte une foi immense en le devenir mécanique, technologique de l'homme. Eussent-ils vécu en ce tournant de 21e siècle, ils se seraient crevé la panse de bonheur à blogger dans les chaumières numériques.
Le train, on ne l'arrête plus. Autant le prendre en marche.
Ma démarche est pour le moins égoïste, en vérité. Car si je me lance à mon tour dans la vaste blogosphère, c'est moins pour toucher la sensibilité des masses, qui ignoreront, c'est le plus probable, dans les grandes largeurs mon propos, que pour réaliser enfin ce vieux fantasme de gosse : la tenue journalière d'un vrai carnet de bord, un archivage systématisé de mes aventures artistiques dans cette sublime ville des festivals, Montréal.
Voilà donc bientôt trois mois que j'ai posé les pieds en terre canadienne. Ou plutôt québécoise. Ou plutôt non : bien montréalaise. Une cité tout à fait à part, dans son histoire et plus sûrement encore dans sa destinée. J'y reviendrai. Toujours est-il que les spectacles, déjà se sont multipliés. Cette ville est fabuleuse. Il s'y passe trop de choses. Et j'oublie tout, trop vite, trop certainement. Abus d'alcool ? Dégénérescence précoce des tissus cellulaires ? Je me sais, à 27 ans seulement, dans l'obligation de désormais noter chacun de mes coups de cœur, chacune de mes déceptions, chacune de mes perplexités afin de ne plus m'égarer dans le vaste univers de mon expérience artistique. C'est triste au premier abord ; et puis à la réflexion, cela me paraît être une sublime opportunité.
Inspiration... plongée !
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