mardi 8 juin 2010

En musique !


J'ai été bénévole, dans le courant du mois de mai, pour un « petit » festival à l'organisation pour le moins familiale, dont la notoriété médiatique et artistique en fait néanmoins un événement solidement implanté dans le calendrier de la ville : le Festival de Musique de chambre de Montréal, dont c'était la 15e édition à l'Eglise St-James, sur la rue Sainte-Catherine.

C'est une joyeuse pagaille : une foule de commanditaires se presse au portique sans que personne ne sache trop bien qui a demandé quoi et les réceptions succédant aux concerts se font le plus souvent en mode portes ouvertes et open bar. L'ambiance décontractée est posée, ce qui dénote à ravir dans le milieu généralement guindé de la musique de chambre. Ici pas de chichi : vendredis « Jazz et Jeans », placement libre, photographes autorisés – en dépit de leurs clacs incessants – et casting renouvelé avec une jeunesse talentueuse.

Ce qui fait avant tout la force du festival, c'est sa programmation (et le réseau tentaculaire de son fondateur et directeur artistique, l'omniprésent Denis Brott ?). En l'espace de trois semaines, se sont succédés en plein downtown des pointures telles que Oliver Jones, Kurt Elling – frais lauréat d'un Grammy, Anton Kuerti, Ilya Kaler, Ignat Solzhenitsyn ou encore Nathalie Choquette, dans des tonalités harmonieusement éclectiques, pour finir par un Marathon Brahms de six heures, que j'ai (heureusement ?) manqué.

La presse a longuement disserté sur le succès habituel de la sélection ; on en trouvera des exemples abondants sur la toile. Parmi mes découvertes plus personnelles :
  • deux sonates de Schumann (FAE en fa majeur, mouvements 2 et 3 ; pour violon nº2 en ré mineur opus 121, idem), d'une grande douceur ;
  • la joie de vivre de la famille Young, où quand Karen la mère invite filles et mari à se produire sur scène pour un quatuor vocal à la tendresse contagieuse ;
  • une inventive soirée cinéma, avec une très bonne composition du pianiste Stephen Prutsman sur un long-métrage oublié, pourtant drôle à en perdre sa mâchoire, de Buster Keaton : « Sherlock Jr » ;
  • le quatuor à cordes nº2 en la mineur, opus 13 de Mendelssohn (mouvements 2, 3, 4 si je ne m'abuse) (cette terrible paresse de toujours oublier de noter les mouvements qui m'ont le plus ému à la sortie d'un concert de musique classique ! cela fait des années que je me promets de le faire, c'est en vérité l'une des raisons d'être majeure de ce blogue) ;
  • le brillantissime enfin, malgré son très jeune âge, Quatuor Afiara, entièrement canadien quoique comptant parmi ses membres deux musiciens d'origine chinoise, ce qui certes a du biaiser un peu mon jugement. J'ai particulièrement aimé la virtuosité et l'impétuosité avec laquelle la premier violon (Valérie Li) et le violoncelle (Adrian Fung) s'emparent de leur partition. L'incessant jeu de pieds de Li traduit son appétit passionnel de musique, le feu qui la transporte lorsqu'elle arrache de son violon de stupéfiants mouvements. Les regards émerveillés que lui lance régulièrement Fung, pour mieux repartir à l'assaut de son propre instrument, montrent quant à eux la complicité, l'osmose artistique qui règnent dans ce groupe au demeurant charmant. Car non content d'être des magiciens sur scène, ils furent bien souvent aussi numéro un à l'apéro !

Tout cela pour souhaiter à cette institution minuscule (trois employés à temps plein et une poignée de bénévoles) tous mes vœux de succès pour la prochaine édition, dont je serai sans aucun doute, et pour inviter les montréalais à réserver quelques-unes de leurs soirées de mai 2011. Car la musique de chambre, qui continue étrangement à se chercher un public un peu partout dans le monde, reste, avec tout le respect que j'ai pour la création musicale de 1920 à nos jours, ce qui se fit encore de mieux dans l'Histoire. Et dire que le plus brillant d'entre eux fut presque sourd dès son enfance...

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